Rien ne change au budget 2019, avant le grand saut dans le vide du Brexit. Mercredi 12 décembre, les eurodéputés ont voté la dernière année du cadre financier 2014-2020 avec la contribution britannique. Après quoi l’UE devra continuer à fonctionner avec 12 milliards d’euros de moins. Se donner les moyens C’est l’un des enjeux du sommet européen des 13 et 14 décembre, où la négociation budgétaire à 27 doit être officiellement lancée pour 2021-2027. Les discussions, en réalité, ont déjà lieu depuis un bon moment, avec d’importants désaccords à surmonter dans le club européen. Le président du Conseil Donald Tusk dans sa lettre d’invitation des chefs d’État, affiche sa confiance sur le respect du calendrier : « Ces derniers mois, le travail a bien avancé, et je propose que nous visions un accord pour l’automne prochain », a-t-il déclaré à ce sommet de décembre. L’Europe cherche à boucler son prochain budget Tout le monde ne partage pas son optimisme. Mardi 11 décembre, en conseil des affaires générales, le commissaire au Budget, Günther Oettinger n’y est pas allé par quatre chemins « On n’avance pas beaucoup, cela freine des quatre fers ! ». Ce dernier condamne depuis l’automne les pays qui ne veulent pas mettre la main à la poche pour compenser le Brexit. Moins de budget, plus de projets La Commission européenne a proposé un budget de 1 279 milliards d’euros sur la période 2021-2027, alors qu’elle avait recommandé 1 033 milliards d’euros pour la période 2014-2020. C’est le prix à payer pour développer le numérique, la recherche, Erasmus, la protection des frontières extérieures de l’UE, et surtout la défense, qui à elle seule coûterait 20 milliards d’euros. Mais cela implique une augmentation des contributions respectives des États membres (1,1 % à 1,2 % du revenu national brut contre 1 % aujourd’hui). Les Pays-Bas, le Danemark, la Finlande et l’Autriche ont fait part de leurs réticences à cette hausse, tandis que les pays de l’Est, tout comme la France et l’Allemagne, consentent à faire un effort. Des Consultations citoyennes sur l’Europe plutôt réussies en France mais quelle ambition européenne ? Vers une PAC verte ? L’un des sujets ultra-sensibles du futur budget est le devenir de la politique agricole commune (PAC), dont la France est la première bénéficiaire. Bruxelles préconise une baisse « d’environ 5 % » des fonds alloués à la PAC (aujourd’hui 37 % du budget). Même chose pour la politique de cohésion de l’UE (35 % du budget), qui de surcroît sera conditionnée au respect de l’état de droit. Paris a d’ores et déjà mis en place une « stratégie d’influence ». Le gouvernement français sait qu’elle peut compter sur un socle solide d’alliés pour négocier : l’Allemagne, l’Irlande, la Finlande, l’Autriche, mais aussi le Portugal, la Grèce, la Slovénie, ou la République tchèque. La France voudrait mettre en place une agriculture moins dépendante des aides, avec un système de bonus-malus donnant la prime aux exploitations les plus innovantes, ou dont l’effort porte sur une alimentation saine. « Mais on est assez esseulés là-dessus », explique-t-on au ministère de l’agriculture. Emmanuel Macron peine à rassurer le monde agricole Solidarité et État de droit Une autre idée explosive, portée par Paris et Berlin, fait son chemin : couper les fonds de solidarité aux pays qui ne respectent pas les grands principes démocratiques. « Le respect de l’état de droit est une condition préalable indispensable à une saine gestion financière et à une mise en œuvre efficace du budget », avait estimé le président de la Commission, Jean-Claude Juncker, lorsqu’il a mis sur la table sa proposition de cadre financier. Un mécanisme serait mis en place pour « suspendre, réduire ou restreindre l’accès aux fonds de l’UE d’une manière proportionnée à la nature, à la gravité et à l’étendue des défaillances généralisées de l’état de droit ». Il pourrait être déclenché à la majorité de 55 % des États membres représentant 65 % de la population de l’UE. Bruxelles promet qu’il n’est pas conçu pour cibler tel ou tel pays. Mais la Pologne et la Hongrie se sentent déjà visés. Le vice-ministre polonais pour les affaires européennes, Konrad Szymanski, a prévenu : « Nous n’accepterons pas de mécanismes arbitraires qui feront de la gestion des fonds un instrument de pression politique à la demande.